Pourquoi choisir ?
Un petit billet pour évoquer le plaisir de switcher, écrit au féminin, mais j'imagine que les garçons peuvent tout à fait ressentir les mêmes choses...
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La domination ou la soumission ? Quand on fait ses premiers pas dans l’univers BDSM, en participant à des soirées par exemple, on réalise qu’il faut rapidement choisir son camp.
C’est ce qui nous définit, notre « étiquette » pour évoluer dans ce milieu. Car si on ne s’affiche pas clairement dominante (avec un fouet ou une cravache à la main par exemple, ou une certaine allure), ou clairement soumise (avec un collier de cuir, ou une certaine attitude), la question vient vite : tu es plutôt domina ou soumise ? Ce n'est pas forcément gênant, surtout au début, quand on "découvre", c'est une question qui offre même une entrée en matière et permet de faire des rencontres... mais au bout de plusieurs années dans le milieu, on est quand même censées avoir gagné en expérience et avoir les idées arrrêtées sur le sujet ;-)
Pour beaucoup, c’est une évidence : elles se sentent maîtresses d’emblée, c’est venu naturellement, depuis toujours ; elles ne se posent pas de questions. Ou au contraire, elles sont soumises, l’ont toujours été. Pour d’autres, comme moi au départ, ce n’est pas si clair. J’étais attirée par l’esthétisme, la beauté des tenues, des séances, et la musique des soirées fetish-BDSM… mais je ne choisissais pas mon « camp » : je ne me sentais pas assez expérimentée, je manquais de confiance pour « dominer », mais ressentir de la douleur ne m’attirait pas du tout, douillette comme je suis, et je n'avais aucun goût pour le sacrifice ou l’humiliation.
J’ai commencé par regarder, bavarder avec des amis, profiter des soirées de façon « festive », avant que les choses ne se précisent peu à peu : je préfère la domination ! Une douce domination, certes, mais une domination quand même ! Et cette prise de conscience, cette « révélation » 😉, c’était comme s’envoler et décoller à la vitesse de la lumière vers les étoiles ! Je vole toujours d'ailleurs ;-)
Les nombreux soumis qui se sont précipités à mes pieds m’ont bien aidée d’ailleurs à me positionner : eux me voyaient comme dominatrice, ils n’avaient aucun doute sur le sujet ; ils courbaient l’échine, s’agenouillaient, se proposaient pour faire ci ou ça, surtout des massages de pieds ;-)... Ils m’ont mise en confiance, je me suis amusée avec eux, sur eux, et j’ai aimé les voir ramper et s’offrir, beaucoup aimé. Sentiment de jubilation, d’exaltation… j’exultais, heureuse dans ces fêtes où l’on pouvait abuser, réclamer, se défouler, jouer, en dehors des conventions du monde "normal", avec des partenaires de jeux consentants. J’ai creusé la question avec enthousiasme, jouant avec mes nouveaux pouvoirs, leurs limites, n’écoutant que ma curiosité pour ce nouveau monde dont je venais de franchir le seuil.
Ce qui m’intéresse dans « tout ça », et ce qui intéresse tout le monde je pense, c’est le plaisir ! Le plaisir que l’on retire de ces pratiques, un plaisir hors normes, inégalé, incomparable, unique en son genre. Les plaisirs devrais-je dire :
- Quand on domine, on se repaît du pouvoir que l’on a sur l’autre. On s’amuse avec un soumis, comme un chat avec une souris, on le maltraite, on le malmène avec une pointe de sadisme qui nous électrise (bien sûr, le soumis est plus que consentant, cela va sans dire, on a vérifié ce point avant).
On a du plaisir à lui faire plaisir aussi, avec certaines pratiques qui lui font beaucoup d’effet, car on s’amuse et on se réjouit de ses réactions. C’est avant tout un plaisir cérébral, qui peut s’incarner dans notre corps (frissons, cœur qui bat plus vite, excitation…) mais cérébral quand même avant tout. Le plaisir de faire plaisir en faisant mal. (je ne sais pas si je suis claire 😉 )
- Le plaisir des soumis peut lui aussi être cérébral, en particulier pour les soumis romantiques, adeptes des relations D/s : plaisir de se donner, de se livrer, de faire plaisir à sa maîtresse.
Mais le plaisir des soumis est le plus souvent sensuel, un plaisir ressenti directement dans leur corps, dans leur chair. Ils sont souvent masochistes à des degrés divers. Ils savent transcender la douleur, et y trouver une forme de jouissance, parfois jusqu’à un état de transe nommé le subspace. La morsure du fouet, la pluie de cuir des martinets, la minuscule brûlure des bougies… autant de sensations et de sources de plaisir, souvent intenses quand la dominatrice et le soumis sont bien connectés, et la domina peut emmener son soumis très loin.
Certains préfèrent ne pas choisir entre ces deux « rôles » : les « switchs ». Ils sont parfois incompris, ou mal vus ; c’est un peu « déplaisant», j’imagine, de ne pas réussir à situer clairement une personne - on aime bien les étiquettes, même si on les déteste aussi 😉
Les switchs ne s’enferment pas dans un rôle, ils alternent au gré de leurs envies, et le plus souvent selon les partenaires de jeux (mais pas toujours, certains couples BDSM switchent). Les switchs ont envie de goûter à tout, de tout essayer… Telle personne leur donnera envie de se soumettre, une autre réveillera plutôt leurs appétits de domination.
De mon côté, je suis curieuse des sensations offertes par le fouet, les martinets, les cordes, et je m'y risque à l'occasion… Pourquoi se priver de telles sources de "plaisirs", de ces ressentis inédits, alors tant pis si mon « image » de domina en prend un coup ;-) et pour les taquineries de certains sur les réseaux sociaux !
L’essentiel, c’est de suivre ses envies ! Je reste domina malgré tout, car je parle de mes envies précisemment, de mes limites (nombreuses !), je choisis les personnes avec qui j’ai envie de réaliser ces séances, car je les sens attentionnées, quelque chose en elles me donne envie de me retrouver entre leurs mains. Elles dégagent un je ne sais quoi qui parle à ma facette soumise, et je bascule… J’ai pu ainsi tester les cordes, l'enfermement, les martinets et le fouet, maniés avec une grande douceur par des dominas ou des dominants indulgents et voulant me faire connaître ces sensations… J'en profite pour les remercier, ils ont souvent fait des efforts pour moi, en se forçant à retenir leurs gestes, m'offrant des caresses du bout de leur fouet ou m'effleurant à peine de leurs lanières de martinet !
- Dans mon cas, cela reste des pratiques et des jeux ponctuels, je ne pense pas avoir jamais l’occasion de vivre une « vraie » relation D/s en tant que soumise (et puis j’en vis déjà une en tant que domina, on ne peut pas tout avoir ;-) ), même si j’ai déjà croisé en soirées des maîtres redoutables, dégageant une aura à laquelle on ne peut rester insensible, capable de subjuguer d’un seul regard. (Ne pas les regarder surtout, au risque de prendre perpet').
Photos : Patrick Lesage (2021), Alain Massa (2018)